APPENDICE D : LOGEMENTS VACANTS — MÉCANISME INCITATIF
Référence : Chapitre XIII (La flat tax)
D.1 — Le principe
Le patrimoine en tant que stock n’est pas taxé. Exception : les logements vacants au-delà d’une durée définie sont soumis à une incitation progressive à les remettre en circulation.
Ce n’est pas une taxe sur le patrimoine. C’est une incitation à générer le flux (loyer) qui sera taxé normalement. Au maximum, on paie comme si on louait — jamais plus.
Figure D.1 — Phases du mécanisme logement vacant
D.2 — Phase 1 : Période de grâce
Durée standard : 24 mois (première vacance ou après une location ayant duré ≥ 4 ans).
Durée réduite : Si la location précédente a duré moins de 4 ans, la période de grâce est réduite à la moitié de la durée de location.
Exemples :
- Location de 6 mois → 3 mois de grâce
- Location de 2 ans → 12 mois de grâce
- Location de 5 ans → 24 mois de grâce (standard)
D.3 — Suspension pour travaux
Les travaux significatifs (sur justificatif) suspendent le délai. Mais la progression reprend là où elle s’est arrêtée — pas de reset, pas de yoyo.
Exemple : 10 mois de vacance, puis 6 mois de travaux, puis reprise. On reprend au mois 11, pas au mois 1.
D.4 — Phase 2 : Taxe progressive
Après la phase 1, une taxe progressive s’applique sur la valeur locative estimée (loyer fictif de marché) :
| Mois | Taux annualisé | Exemple (loyer estimé 3 500€/an) |
|---|---|---|
| 1 | 0.25% | ~9€/mois |
| 2 | 0.50% | ~18€/mois |
| 3 | 0.75% | ~26€/mois |
| 4 | 1.00% | ~35€/mois |
| 5 | 1.50% | ~52€/mois |
| 6 | 2.00% | ~70€/mois |
| 7 | 3.00% | ~105€/mois |
| 8 | 4.00% | ~140€/mois |
| 9 | 5.00% | ~175€/mois |
| … | … | … |
| Plafond | Taux flat tax (ex: 20%) | ~700€/mois |
Tableau D.1 — Barème progressif de la taxe sur logements vacants
Figure D.2 — Progression de la taxe sur les logements vacants
D.5 — Sortie du mécanisme
Location effective : Reset complet du compteur. Nouveau cycle si nouvelle vacance.
Vente : Nouveau propriétaire = nouveau cycle complet (24 mois de grâce).
D.6 — Seuil de déclenchement
À définir par la loi :
- Dès le premier logement vacant plus de X jours par an, OU
- Au-delà de Y logements vacants
D.7 — Ce qui est constitutionnalisé
- Le principe de l’incitation progressive
- Le plafond aligné sur le taux de la flat tax
- La règle anti-yoyo (pas de reset par travaux fictifs)
Les curseurs exacts (paliers, vitesse, plafond) relèvent du calibrage législatif local.
D.8 — Étude de cas : La taxe sur les logements vacants de Vancouver (2017-présent)
Vancouver a introduit en 2017 l’Empty Homes Tax (EHT), une taxe annuelle sur les propriétés résidentielles laissées vacantes plus de 6 mois par an [71][72]. C’est l’un des dispositifs les plus étudiés de lutte contre la vacance immobilière.
Ce qui a fonctionné
Réduction mesurable de la vacance. Le nombre de logements déclarés vacants a diminué de 25% entre 2017 et 2019 [71]. Environ 18 000 logements ont été remis sur le marché locatif ou vendus suite à l’introduction de la taxe.
Revenus significatifs. La taxe génère environ 50-80 millions de dollars canadiens par an, réinvestis dans le logement abordable [72].
Taux progressif dissuasif. Le taux est passé de 1% (2017) à 3% (2021) puis 5% (2023) de la valeur du bien. La progression a renforcé l’incitation à remettre les logements en circulation.
Déclaration obligatoire. Tous les propriétaires doivent déclarer le statut de leur bien chaque année. Le défaut de déclaration entraîne automatiquement la classification “vacant” et la taxation.
Exemptions raisonnables. Les travaux majeurs, les décès, les hospitalisations longues, les transferts professionnels temporaires sont exemptés. Le système distingue la vacance choisie de la vacance subie.
Ce qui pose problème
Impact limité sur les prix. Malgré la réduction de la vacance, les prix de l’immobilier à Vancouver n’ont pas significativement baissé [72]. D’autres facteurs dominent le marché.
Évasion par location fictive. Certains propriétaires louent fictivement à des proches ou déclarent une occupation partielle. Les contrôles sont difficiles.
Effets de seuil. La limite de 6 mois crée un comportement stratégique : louer 6 mois et 1 jour pour échapper à la taxe, même si ce n’est pas une vraie location.
Base de calcul contestée. La taxe est assise sur la valeur du bien, pas sur le loyer fictif. Un appartement de luxe vide dans un quartier cher peut payer plus qu’un immeuble entier de logements modestes vacants.
Pas d’effet de stock. La taxe dissuade la vacance future mais ne “rattrape” pas les années passées de vacance. Pas d’effet rétroactif.
Ce qu’on garde du modèle vancouverois
- Le principe d’une taxe progressive sur les logements vacants
- Les exemptions raisonnables pour les situations subies (travaux, maladie, transfert)
- La déclaration obligatoire annuelle de tous les propriétaires
- Le réinvestissement des revenus dans le logement
Ce qu’on améliore
- Base = loyer fictif, pas valeur du bien : notre système taxe le flux évité, pas le stock. Plus cohérent économiquement
- Plafond = taux de la flat tax : on ne paie jamais plus que si on louait effectivement. Vancouver peut taxer au-delà du rendement locatif
- Règle anti-yoyo : les travaux suspendent le délai mais ne le remettent pas à zéro. Pas de manipulation par travaux fictifs répétés
- Progression mensuelle, pas annuelle : incitation plus fine, moins d’effets de seuil
Ce qu’on ne reprend pas
- La base sur la valeur du bien : économiquement moins cohérent que le loyer fictif
- Le seuil binaire de 6 mois : notre système utilise une progression continue
- L’absence de période de grâce : notre système accorde 24 mois avant toute taxation
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