APPENDICE A : POURQUOI CE LIBERTARIANISME LIBERTAIRE ?

Référence : Vue d’ensemble du manifeste

Le libertarianisme n’est pas un bloc monolithique. C’est une famille de pensées qui va de l’État limité à l’absence totale d’État. Où se situe ce manifeste, et pourquoi ?

Le libertarianisme classique (Hayek, Friedman) accepte un État limité mais relativement souple. Il tolère certaines interventions – politique monétaire, filets sociaux temporaires, parfois même un impôt négatif. Le risque : sans verrouillage constitutionnel strict, l’État s’étend inexorablement. Chaque exception devient un précédent. C’est l’histoire des démocraties occidentales depuis un siècle.

Le minarchisme (Nozick, Bastiat) réduit l’État au strict régalien : justice, police, armée. Rien d’autre. C’est plus cohérent, mais il laisse deux problèmes non résolus. Primo, la recherche fondamentale – aucun acteur privé ne financera des travaux dont le retour sur investissement se compte en décennies ou en siècles. Secundo, le filet ultime – que fait-on de ceux qui ont tout perdu et que le marché ne peut pas absorber ? Les laisser mourir dans la rue n’est ni éthique ni politiquement stable.

L’anarcho-capitalisme (Rothbard, David Friedman, Hoppe) va jusqu’au bout : zéro État, même pas le régalien. Justice privée, police privée, défense privée. C’est intellectuellement pur, mais économiquement fragile. Sans monopole de la violence légitime, les agences de sécurité concurrentes risquent le conflit armé. Les coûts de transaction explosent : chaque interaction nécessite de vérifier la réputation de l’autre partie, de négocier les règles applicables, de prévoir les recours. L’insécurité juridique freine les investissements de long terme. Et l’anarcho-capitalisme est probablement instable : il tend soit vers le chaos, soit vers l’émergence d’un proto-État quand l’agence de sécurité dominante devient de facto souveraine.

Spectre des libertarianismes Spectre des libertarianismes Figure A.1 — Spectre des libertarianismes

Ce manifeste propose un quatrième chemin : le Libertarianisme Libertaire, constitutionnellement verrouillé. Il conserve du minarchisme l’État régalien. Il y ajoute la recherche fondamentale (comme le libertarianisme classique le tolérait) et les Collectivités Autonomes – un filet auto-financé qui ne coûte rien au contribuable. Il verrouille le tout aux quatre cinquièmes de chaque chambre pour éviter la dérive. Et il emprunte à l’anarcho-capitalisme la concurrence des monnaies, éliminant le pouvoir de l’État sur la création monétaire.

C’est un optimum pratique. Il capture 90% des bénéfices de la liberté économique tout en conservant les fonctions étatiques à rendement positif. Autant partir d’un État minimal verrouillé plutôt que d’y arriver par accident – ou de ne jamais y arriver du tout.

La symbiose, c’est cela : des organismes différents qui vivent ensemble, chacun y gagne, aucun ne parasite l’autre. La solidarité sans la spoliation : ni assistés, ni abandonnés.

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